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Investigation Financière Economique et Boursière
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26 septembre 2012

Etude de Standard and Poor's sur la Banque Nationale Suisse. De nombreuses faiblesses.

Mardi 25 septembre 2012, des analystes de Standard & Poor's ont publié une étude de 10 pages intitulée How The Swiss National Bank Is Driving Down Yields For The Eurozone dans laquelle les auteurs croient démontrer que la Banque Nationale Suisse a contribué à diminuer les coûts d'emprunt de pays refuges de la zone Euro (Allemagne, France, Pays-Bas, Finlande, Autriche) en augmentant de manière substantielle sa participation aux émissions de ces pays en 2012.

La BNS aurait acheté environ 60 milliards d'euros d'obligations souveraines de ces pays, soit 38 % de leurs déficits prévus pour 2012, contre 9 % en 2011.

- Les Echos avec AFP, La BNS contribue à baisser le coût des emprunts dans la zone euro (analystes), 25 septembre 2012
http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/finance-marches/actu/afp-00466875-la-bns-contribue-a-baisser-le-cout-des-emprunts-dans-la-zone-euro-analystes-365466.php

- La Tribune, Zone euro: la Suisse aurait largement soutenu la dette de plusieurs pays, 26 septembre 2012
http://www.latribune.fr/actualites/economie/international/20120926trib000721399/zone-euro-la-suisse-aurait-largement-soutenu-la-dette-de-plusieurs-pays.html

Premier problème pour l'étude, la BNS elle-même a rapidement transmis un communiqué à Swiss News Agency, dans lequel la BNS affirme que "l'étude S&P contient une erreur fondamentale", elle ne tient pas compte des dépôts de la BNS auprès d'autres banques centrales et institutions internationales, pourtant publiés chaque mois. Les conclusions de S&P seraient infondées.

- Le Temps, La BNS conteste les conclusions d’un rapport de Standard & Poor’s, par Sébastien Dubas, 25 septembre 2011
http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/93386982-06f9-11e2-a279-e587327816d3/La_BNS_conteste_les_conclusions_dun_rapport_de_Standard__Poors

- Swiss Info, Ratings agency questions SNB euro intervention, 25 septembre 2012
http://www.swissinfo.ch/eng/business/Swiss_investments_sharpen_eurozone_divide.html?cid=33588998

InvestigationFin ne s'est pas contenté de ça, a lu l'étude S&P, et est en mesure de vous montrer d'autres faiblesses.

I. Dans le détail de l'estimation chiffrée de S&P : les trois faiblesses identifiées

L'étude S&P combine trois paramètres entre eux, chiffres issus de la BNS :

- le total des réserves de change de la BNS de fin 2008 à fin juin 2012 ; fin 2009 163,8 MdCHF fin juin 2012 430,3 MdCHF
- le pourcentage des réserves de change en euros ; fin 2009 58 % fin juin 2012 60 %
- le pourcentage des réserves de change en obligations souveraines ; fin 2009 84 % fin juin 2012 85 %
- le pourcentage des obligations souveraines notées AAA en moyenne par les trois principales agences de notation ; fin 2009 84 % fin 2012 86 %

Fin juin 2012, 60 % x 85 % x 86 % donnent bien les 44 % de l'étude, soit 189,3 MdCHF.

page 8
"The implication is that about 44% of current reserves are held in liquid eurozone government bonds rated 'AAA' by at least two major agencies and at least 'AA+' by a third, compared with about 36% in 2011".

Première faiblesse : qu'est-ce qui permet à S&P de croire que la répartition du poids des dettes souveraines (toutes devises) est la même en euros ou dans les autres devises ? cette hypothèse simplificatrice n'est pas commentée dans l'étude.

L'obtention du chiffre de 60 milliards d'euros censés représenter les achats par la BNS d'obligations souveraines des pays refuge au premier semestre 2012 donne matière à critique.

Le raisonnement de S&P est le suivant :

S&P considère l'augmentation des réserves de change de la BNS entre fin 2009 et fin juin 2012 à 250 milliards d'euros.

En francs suisses, c'est pourtant 266,5 MdCHF (fin 2009 163,8 MdCHF fin juin 2012 430,3 MdCHF), ce qui, au cours de conversion de 1 euro = 1,2 francs suisses, donne 222,1 milliards d'euros !

Bizarrement, S&P veut appliquer 44 %, qui correspond au premier semestre 2012 seulement ! à cette évolution entre fin 2009 et fin juin 2012 ! Alors que les taux équivalents pour 2011 sont de 36 % et pour 2010 de 37 %.

44 % de ces 222,1 MdE donnent 97,7 MdE ce qui n'est pas le bon résultat puisque S&P affiche une augmentation de 112 MdE.

D'ailleurs 44 % x 250 = 110 MdE, ce qui laisse suggérer que les 250 milliards d'euros sont en fait arrondis, le vrai chiffre étant de 254,6 MdE ! Un arrondi large !

En fait, le raisonnement correct qui permet d'obtenir à peu près les 60 MdE est le suivant :
fin juin 2012 44 % de 430,3 MdCHF (réserves totales) = 189,3 MdCHF
fin 2011 36 % de 319,4 MdCHF (réserves totales) = 115,0 MdCHF
d'où une évolution de 74,34 MdCHF, soit, à 1 E ) 1,2 CHF, 61,95 MdE ! CQFD.

Deuxième faiblesse : méthode d'obtention du chiffre de 60 milliards d'euros pour le premier semestre 2012 sujette à caution.

L'étude S&P indique que ces 60 milliards d'euros d'achats par la BNS de dette souveraine des cinq pays dits refuge représentent 38 % de leurs déficits publics prévisionnels 2012.

Bien plus que les 12 % en 2010 et 9 % en 2011.

InvestigationFin a vérifié la cohérence de ces chiffres :
Les déficits cumulés des cinq pays se sont élevés en 2010 à 290,2 MdE et en 2011 (première notification CE) à 165,8 MdE.
12 % x 290,2 = 34,8 MdE et 9 % x 165,8 = 14,9 MdE
35 pour 2010 + 15 pour 2011 + 60 pour 2012 donnent bien 110 MdE.

S&P se sert de cette augmentation de poids entre 2010-2011 et 2012 pour étayer la conclusion de l'étude, lire Overview en page 1 :
"The SNB's eurozone bond buying during the seven months of 2012 is equivalent to about 48% of the combined full-year deficits we estimate for the eurozone core for the whole of 2012, up from 9% in 2011.
In our view, this has significantly contributed to the declining yields on bonds issued by the core sovereigns during 2012."

Il est quand même étonnant que S&P se réfère aux déficits publics plutôt qu'aux BESOINS de FINANCEMENT pour appuyer son raisonnement.

Ainsi, pour la France, le déficit public 2011 s'élève à 103 milliards d'euros alors que son besoin de financement était le double, à 208 milliards d'euros.

Pour 2012, le déficit public est prévu à 4,4 % du PIB, ce qui ,avec un PIB 2012 estimé à 2 037 MdE (1997 x croissance 0,4 % effet déflateur 1,6 %), donne environ 90 milliards d'euros de déficit public. Alors que le besoin de financement 2012 selon l'AFT était affiché à 178 MdE.

http://www.aft.gouv.fr/articles/indicative-state-medium-and-long-term-borrowing-programme-for-2012_10053_lng1.html

Troisième faiblesse : S&P fait référence aux déficits publics alors qu'il conviendrait de raisonner en termes de besoins de financement.

II. Focus sur les émissions de l'AFT entre 2011 et 2012. Analyse des volumes demandés

Puisque S&P prétend que la BNS a fortement accru ses achats d'obligations souveraines de la France entre 2011 et 2012 (possible), cela a-t-il pu avoir un impact sur les volumes demandés lors des différentes adjudications ?

Le niveau de taux d'intérêt pouvant dépendre du niveau de la demande, la BNS aurait-elle pu en moyenne se rajouter à d'autres investisseurs ou bien aurait-elle remplacé d'autres investisseurs ?

Totalisation des volumes demandés, adjugés et émis pour les titres à moyen et long terme (OAT, OATi, BTAN, BTANi) :

2011 volumes demandés 443,9 MdE volumes adjugés 186,8 MdE volumes totaux émis 204,8 MdE
ratio demandés / adjugés 2,38 ratio demandés / total émis 2,17

30 juin 2012 volumes demandés 257,5 MdE volumes adjugés 106,8 MdE volumes totaux émis 117,7 MdE
ratio demandés / adjugés 2,41 ratio demandés / total émis 2,19

source : calculs InvestigationFin à partir de l'AFT

2,38 x 106,8 = 254,2, soit une différence de 3 MdE seulement avec les 257,5 au 30 juin 2012 !

On ne peut pas vraiment observer qu'une action massive selon S&P de la Banque Nationale Suisse a pu changer la donne au niveau de la pression sur les volumes demandés entre 2011 et les six premiers mois de 2012 !

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