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Investigation Financière Economique et Boursière
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26 février 2013

L'étrange calcul de Reuters estimant un bénéfice de 6 milliards d'euros sur les obligations grecques détenues par l'Eurosystème

I. Les extrapolations dans la presse. Selon Reuters, des produits nets liés à la Grèce à 6 milliards d'euros

C'est un bien étrange calcul que s'est livré Reuters pour affirmer que le bénéfice en 2012 sur les obligations grecques détenues par l'Eurosystème pourrait atteindre six milliards d'euros !

Reuters, Des profits de la BCE sur la dette grecque prometteurs pour Athènes, 21 février 2013
http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/finance-marches/actu/reuters-00501926-des-profits-de-la-bce-sur-la-dette-grecque-prometteurs-pour-athenes-540965.php

Le 21 février 2013, la BCE a annoncé 555 millions de bénéfices en 2012 sur son portefeuille d'obligations grecques.

D'après le communiqué de presse de la BCE, ces 555 millions d'euros (contre 654 en 2011) représentent les produits nets d'intérêt des avoirs en obligations d'Etat grecques acquises au titre du PMT.
http://www.ecb.int/press/pr/date/2013/html/pr130221.fr.html

Le même jour, la BCE a publié le détail par pays des obligations du programme SMP Securities Markets Programme (PMT en français) pour l'ensemble de l'Eurosystème (dont la BCE) : 33,9 milliards d'euros pour la Grèce en valeur nominale au 31 décembre 2012 (30,8 en valeur comptable). Sur un total de 218,0 en nominal (208,7 en valeur comptable) pour l'ensemble des pays.
http://www.ecb.int/press/pr/date/2013/html/pr130221_1.en.html

Le Financial Times n'effectue pas une extrapolation à l'eurosytème des produits nets d'intérêt du programme SMP sur la seule Grèce mais à l'ensemble des pays : au lieu de 6 milliards d'euros pour la Grèce (Reuters) le quotidien annonce 14 milliards d'euros .

ECB unveils €1.1bn profit on crisis bonds, par Michael Steen
http://www.ft.com/cms/s/0/c9a5a882-7c32-11e2-bf52-00144feabdc0.html#axzz2LdgUTeHN

D'après les comptes annuels 2012 de la BCE, le programme pour les marchés de titres est comptabilisé à hauteur de 17 792 millions d'euros.

Par une règle de 3, l'extrapolation des 555 millions de produits d'intérêt net de la seule BCE donnerait 6,5 milliards d'euros pour l'ensemble de l'Eurosystème : 555 x 17 792 / 208 700 = 6 510 ME.

Cette extrapolation est-elle bien correcte ?

II. Calculs InvestigationFin. Une extrapolation hasardeuse sur la Grèce. Plutôt des produits nets liés à la Grèce inférieurs à 2,3 milliards d'euros au moins

Les documents publiés par la Grèce lors de l'échange PSI de début 2012 permettaient d'obtenir le détail précis des encours détenus par la BCE et les banques centrales nationales.

43 lignes d'échéance allant de 2012 à 2037, pour un total fin 2011 de 57,2 milliards d'euros et 46,0 milliards d'euros fin 2012 d'après mes calculs.

Pourquoi ce dernier chiffre (46 milliards d'euros) diffère de celui du communiqué de la BCE (33,9 milliards d'euros en valeur nominale) ?

Parce que les banques centrales nationales ont acheté hors programme SMP des titres publics grecs.

Ce qui est intéressant, c'est qu'à partir de la liste des titres connue au moment de la procédure de l'échange PSI, on peut estimer, relativement aux 46 milliards d'euros à fin 2012 en nominal :

- les intérêts 2012, 2 836 millions d'euros (2011 2 836 ME également) ;
- l'amortissement annuel 2012 des titres achetés avec décote 1 031 millions d'euros (2011 1 337 ME).

Soit un total estimé de produits bruts 2012 de 3,9 milliards d'euros pour l'ensemble des titres publics grecs détenus par la BCE et les BCNs.

Loin des 6 milliards d'euros calculés par Reuters.

Et encore les 555 millions d'euros du communiqué de la BCE sont nets du coût de financement de la BCE. En mai 2010, le taux directeur de la BCE était de 1,75 %.

Le coût estimé de financement des 46 milliards d'euros de titres décotés (46 x 30,8 / 33,9) à 1,75 % est de 0,7 MdE.

Donc en retranchant 0,7 des 3,9 bruts cela donne 3,2 nets. Et avec la règle de trois (33,9 / 46,0), on obtient 2,3 milliards d'euros. Encore plus loin des 6 milliards d'euros calculés par Reuters.

Il semble évident que la règle de trois appliquée dans la presse (8,5 % sur la Grèce) est erronée : dans le programme SMP, la BCE détient une proportion bien plus importante que les autres BCNs !

Mais de combien pourrait-elle être ?

Au maximum de 38,7 % si l'ensemble de la ligne comptable à fin 2012 SMP (17,8 milliards d'euros) est composée uniquement de titres grecs, ce qui est peu probable.

Le communiqué de la BCE fournissait d'autres données intéressantes.

1) la maturité restante à fin 2012 des 33,9 MdE de titres grecs en nominal : 3,6 ans

Or j'ai pu estimer la maturité à fin 2012 de l'ensemble des 46,0 MdE de titres grecs à 3,8 ans ! Un chiffre assez proche des 3,6 ans. Enseignement ? Une règle de 3 pour passer des titres SMP Eurosystème (33,9 MdE fin 2012) à l'ensemble des titres détenus par la BCE et les BCNs n'est pas incongrue.

2) les produits nets d'intérêts de 2011 s'élevaient à 654 millions d'euros contre 555 en 2012, une différence de 99 millions d'euros.

Or pour les 46 MdE de fin 2012 les intérêts 2011 et 2012 sont estimés identiques , à 2,8 MdE. La différence peut provenir :
- de l'amortissement différent annuel 306 millions d'euros (1 337 ME en 2011 1 031 ME en 2012)
- du coût de financement différent entre un encours de 57,2 MdE fin 2011 et de 46 MdE fin 2012 : impact estimé à - 1,75 % x (57,2 - 46) =- 195 millions d'euros

Il s'agit donc de résoudre l'équation suivante, où X est le pourcentage de détention dans les 46 milliards d'euros à fin 2012 de la seule BCE :
654 - 555 = 99 = X x [(1 337 - 1031) - (1,75 % x (57 178 - 46 019))]
d'où X = 99 / 111 = 89 % sachant que la précision sur les estimations de coût de financement est incertaine.

Difficile d'estimer la part de titres publics grecs détenus par la seule BCE dans le cadred du programme SMP, même si d'après mes calculs elle est bien supérieure à celle retenue par Reuters.

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