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Investigation Financière Economique et Boursière
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26 juin 2012

Une estimation grotesque dans Les Echos sur le coût soi-disant bien amorti pour l'Allemagne et la France de l'aide à la Grèce

Retour en douceur progressivement vers InvestigationFin alors que le Petit Journal Technique du Procès en Appel de Jérôme Kerviel touche à sa fin.
http://olivierfluke.canalblog.com/archives/2012/06/26/24581987.html

Isabelle Couet, dans Les Echos du 21 juin 2012, titrait L'aide à la Grèce ne coûte rien à l'Allemagne. Puis en sous-titre, la France a amorti son soutien à la Grèce à 80 %.
http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/finance-marches/actu/0202129878038-l-aide-a-la-grece-ne-coute-rien-a-l-allemagne-336368.php

Sa source ? Un calcul approximatif (si si il n'y a pas qu'InvestigationFin qui effectue des calculs qui servent de base à un article) selon les termes mêmes de la journaliste.

Approximatif, le mot est faible. Grossier et grotesque très certainement.

Quelles sont donc les approximations effectuées par l'auteur ?

"Un stock de dette publique de 2200 milliards d'euros pour l'Allemagne et 2000 milliards pour la France, renouvelé tous les 6 ans. Les économies réalisées représentent les taux verrouillés en 2010, 2011, 2012 pour six ans comparé au taux de 2009."

Explicitons le calcul effectué par la journaliste :

baisse des taux à 6 ans 2012 / 2009 + baisse des taux à 6 ans 2011 / 2009 + baisse des taux à 6 ans 2010 / 2009) x stock de dette publique x 6 ans divisés par 6 ans
Seul le chiffre de l'écart 2012 / 2009 peut être déduit, pour l'Allemagne 1,65 % (2009 2,6 % 2012 0,95 %) et pour la France 0,94 % (2009 2,91 % 2012 1,97 %)

Supposons pour la France + 0,4 % puis + 0,6 % puis + 0,94 %, cela donne 1,94 % x 2000 x 6 / 6 = 38,8

La journaliste prétend qu'ainsi les gains théoriques réalisés s'élèvent à 63 milliards d'euros pour l'Allemagne et à 38 milliards d'euros pour la France.

La facture des deux plans de sauvetage pour la Grèce étant de 67 milliards d'euros pour l'Allemagne et de 48 milliards d'euros pour la France, la journaliste en déduit que la baisse des coûts de financement de l'Allemagne depuis 2009 compense (63 contre 67) le coût de l'aide à la Grèce, alors que la France amortit son soutien à 80 % (38 contre 48 soit 79,2 %).

Pourquoi le calcul effectué est-il grossier et grotesque ?

Au-delà du verrouillage des chiffres de taux et de stock de dette publique sur 6 ans, les critiques suivantes peuvent être émises.

1) côté coûts d'emprunt, leur diminution est intégralement attribué à l'effet valeur refuge

Alors que d'autres facteurs peuvent expliquer cette évolution à la baisse, comme par exemple la diminution des taux de refinancement de la BCE entre 2009 et 2011. 2009 2 % à 1 % 2010 1 % 2011 1,5 à 1 %
http://www.ecb.int/stats/monetary/rates/html/index.en.html

2) côté coût d'emprunt encore, leur diminution est intégralement attribuée à la conséquence de la crise grecque.

Comme si la hausse des taux à moyen terme sur les emprunts italiens et espagnols n'avaient pas d'incidence également ? Rien qu'avec du 50 -50, et le titre de l'article peut être jeté à la poubelle illico.

3) côté aide, seule la Grèce est considérée alors que la problématique concerne d'autres pays, ce que note la journaliste en fin d'article fort heureusement, avec l'Irlande, le Portugal, les banques espagnoles.

4) le stock de dette publique pour la France est grossièrement augmenté à 2 000 milliards d'euros.

D'après Eurostat, la dette publique de l'Allemagne s'élève à 2 088 milliards d'euros fin 2011, celle de la France à 1 717 milliards d'euros. Le calcul commençant à partir de 2010 et s'étalant sur 6 ans, quel niveau de dette publique à fin 2015 ? D'après le programme Hollande 85,8 % du PIB estimé à 2 284 milliards d'euros (calculs InvestigationFin), soit 1 960 milliards d'euros. La dette publique était de 1 595 milliards fin 2010.
http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/2-23042012-AP/FR/2-23042012-AP-FR.PDF

Donc la journaliste effectue un calcul sur un stock de dette de 2 000 milliards d'euros, alors qu'entre fin 2010 et fin 2015 la dette publique évoluerait de 1 595 à 1 960 milliards d'euros. 1 800 milliards aurait été moins approximatif ! Rien qu'avec cette remarque, le taux de 80 % passe à 72 % grossièrement.

5) Pourquoi la dette est-elle renouvelée tous les 6 ans, alors que la durée de vie moyenne de la dette de l'Etat (qui est différente de la dette publique) pour la France est supérieure à 7 ans depuis 2010 ?

- 7 ans et 56 jours au 30 avril 2012
mai 2012
http://www.aft.gouv.fr/documents/%7BC3BAF1F0-F068-4305-821D-B8B2BF4F9AF6%7D/publication/attachments/21693.pdf

- 7 ans et 57 jours au 31 décembre 2011
janvier 2012
http://www.aft.gouv.fr/documents/%7BC3BAF1F0-F068-4305-821D-B8B2BF4F9AF6%7D/publication/attachments/20818.pdf

- 7 ans et 68 jours au 31 décembre 2010
janvier 2011
http://www.aft.gouv.fr/documents/%7BC3BAF1F0-F068-4305-821D-B8B2BF4F9AF6%7D/publication/attachments/20161.pdf

- 6 ans et 246 jours au 31 décembre 2009
janvier 2010
http://www.aft.gouv.fr/documents/%7BC3BAF1F0-F068-4305-821D-B8B2BF4F9AF6%7D/publication/attachments/20154.pdf

Encore un paramètre majoré pour faire en sorte que la conclusion soit bonne ?

6) Avec de telles remarques, il convenait de vérifier les chiffres fournis par la journaliste de taux à 6 ans en 2009 et 2012 pour la France par exemple.

Les Echos France 2009 2,91 % 2012 1,97 %

Se référer aux taux du marché secondaire serait une erreur, il convient de se référer aux prix moyens pondérés des OAT (pour la France) émises en 2009 avec une maturité proche de 6 ans (prenons entre 5 ans + 1 jour et 7 ans - 1 jour) : j'identifie 7 émissions, de moyenne sans pondération des volumes adjugés à 2,97 % et avec pondération à 3 %. Proches du 2,91 % retenu par la journaliste.

sources : http://www.aft.gouv.fr/communique-de-presse_2009.html

Pour 2012, hors OAT€i, j'identifie 5 émissions d'OAT, de moyenne sans pondération des volumes adjugés à 2,02 % et avec pondération à 2,01 %. Proches du 1,97 % retenu par la journaliste.

sources : http://www.aft.gouv.fr/communique-de-presse_2012.html

Pour le reste, ...

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Commentaires
O
Merci pour le lien. Pourquoi pas, la foire aux idées est bienvenue au point où on en est. D'abord, pour reprendre un des commentaires, arrêter d'emprunter et le problème des taux d'intérêt sera réglé. Restructurer et taxer l'épargne et la propriété en one shot ! Equilibrer les budgets de suite, quitte à plomber la croissance une année, et ça repartira derrière. Ensuite, les besoins de financement de l'Italie et l'Espagne étant de 300 MdE, 1 % c'est 3 MdE. Donc je ne comprends pas trop le 1,9 MdE. Encore moins comment 1,9 MdE permettent d'arriver à 4,1 % pour l'Italie et 4,4 % pour l'Espagne. Comme pour la Grèce, ce n'est même pas avec 4 % que l'Espagne s'en sortira, c'est beaucoup moins, voire une restructuration comme la Grèce !
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B
Bonjour, <br /> <br /> Merci pour ce décorticage de cet article des Echos. <br /> <br /> Que pensez-vous de cette idée ? <br /> <br /> http://blogs.reuters.com/hugo-dixon/2012/06/25/how-50-bln-euros-might-save-the-euro/<br /> <br /> <br /> <br /> Merci par avance ;)
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