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Investigation Financière Economique et Boursière
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19 novembre 2010

Article 10 réforme des retraites Partie I. 15,6 milliards d'effort de l'Etat pour équilibrer le système. Le COR dans le décor ?

C'est une enquête détaillée exceptionnelle tant dans son aspect inédit que sa profondeur technique qu'investigationfin vous livre sur l'un des principaux chiffres de la réforme des retraites : 15,6 milliards d'euros.

Un chiffre élevé, mystérieux, incompris et sous-étudié !

Lorsque la réforme des retraites a été présentée en juin 2010, l'équilibre financier du système prévoyait, de 2011 à 2018, un effort de l'Etat au régime de retraite des fonctionnaires maintenu au niveau de son accroissement entre 2000 et 2010, soit 15,6 milliards d'euros.

Si vous ne l'avez pas encore compris, lisez 2 fois ce qui suit.

Le COR avait, par convention, fixé le solde technique du régime des fonctionnaires à 0 en 2000.

Mais la contribution de l'Etat n'était pas nulle en 2000. D'après le jaune pensions du PLF 2003, la contribution de l'Etat (solde non technique certes) s'élevait à 22,5 milliards d'euros.

Les 15,6 milliards d'euros qui apparaissent dans l'objectif d'équilibre financier du système des retraites, c'est l'augmentation entre 2000 et 2010 (en euros 2008), pas le niveau de 2010.

C'est quoi exactement ces 15,6 milliards d'euros, ce chiffre est-il bien justifié ?

Investigationfin a publié plusieurs articles (5 8 et 9) sur un sujet qui a nécessité d'importants travaux de recherches supplémentaires.

Cette fois, le COR, la Direction du Budget et le Ministère du Travail ont été interrogés. Le COR me renvoie à la direction du Budget pour expliquer des écarts, notamment sur la masse des traitements (voir partie 2). Sauf que la direction du Budget me renvoie au Ministère du Travail et au Secrétariat de la Fonction Publique.

Dans une première partie je montrerai que les comptes publiés du régime de retraite des fonctionnaires permettent de mettre en évidence des chiffres différents : 12,5 milliards d'euros en périmètre élargi et 16,4 milliards d'euros en solde technique avec pensions et cotisations réelles.

L'enjeu d'un écart entre les 15,6 MdE et la réalité ? Nous tenterons de l'appréhender.

Dans une deuxième partie, la méthode utilisée par le COR sera décortiquée et auditée.

Article 10. Partie I

Jusque-là, le Conseil d'Orientation des Retraites a publié un solde technique en exécution du régime FPE pour les exercices 2000, 2003, 2006 et 2008 :

solde technique FPE

2000

2003

2006

2008

2010

euros courants

oui

oui

oui

oui

non

cotisations

28 944

29 776

31 644

30 000

nc

prestations

- 28 944

- 32 917

- 37 883

- 41 200

nc

solde technique

0

- 3 141

- 6239

- 11 200

- 15 600

source

(a) et (b)

(b)

(c)

(a)

(a)

2010 : données en euros 2008

(a) rapport COR 1327 du 14 avril 2010 (huitième)

(b) rapport COR 458 du 20 avril 2005

(c) rapport COR 824 du 22 octobre 2007

Pour 2008, 28 944 provient d'un calcul investigationfin à partir de 30 615 ME (euros constants 2003) modifiés en euros courants 2000 de la manière suivant : 30 615 fois 102,2 / 108,1 = 28 944.

source des 102,2 (moyenne 2000) et 108,1 (moyenne 2003) des indices IPC :

http://www.indices.insee.fr/bsweb/servlet/bsweb?action=BS_SERIE&BS_IDBANK=000639202&BS_IDARBO=06000000000000

Rappels : Le taux de contribution de l'Etat employeur est maintenu par convention au niveau de 2000. Le solde technique est donc nul par construction en 2000. Entre 2000 et 2010, l'effort de l'Etat pour équilibrer le régime s'est accru de 15,6 milliards d'euros (euros de 2008). Le taux de cotisation à la charge des salariés est de 7,85 %. Le taux de cotisation implicite de l'Etat employeur, calculé en 2000, s'élève à 43,82 %. IL EST MAINTENU CONSTANT TOUT AU LONG DE LA PERIODE DE PROJECTION.

Sauf que ce taux a été fixé arbitrairement à partir de données réelles de l'année 2000.

Et lorsque le COR écrit dans son huitième rapport que les cotisations employeurs (donc à fortiori l'ensemble des cotisations) sont fictives, il faut comprendre qu'elles le sont même lorsque les prestations sont elles réelles !

D'ailleurs, écrit en tout petit, en bas de page du rapport 824 du COR daté du 22 octobre 2007 :

« Depuis le 1er janvier 2006, les comptes du régime de la FPE sont retracés au sein du compte d’affectation spéciale (CAS) « pensions ». Un taux de contribution spécifique permet d’équilibrer, année après année, le régime (en distinguant les civils et les militaires). Ce taux résulte d’un calcul différent de celui du taux de contribution technique des projections pour le COR car il prend en compte, en sus des dépenses de pension et de compensation démographique, les recettes en provenance de l’ensemble des employeurs publics (établissements publics, collectivités locales employant des agents détachés, France Télécom, La Poste…), lesquels sont soumis à des taux de contribution forfaitaires différents. En conséquence, le taux affiché du CAS Pensions diffère sensiblement du taux technique présenté dans les travaux du COR. »

Différent ! En catimini le COR avait gravé sur le marbre le fait que son solde technique était différent de celui de la comptabilité budgétaire nationale !

En conséquence, par définition, la mesure de l'effort de l'Etat affichée dans les rapports du COR est forcément différente de la réalité. Ce qu'investigationfin tente d'estimer selon deux approches.

Première réalité de l'évolution entre 2000 et 2010 de l'effort de l'Etat : périmètre élargi

Dans son rapport de mars 2006, le COR avait présenté des résultats en solde élargi et pas seulement technique, pour tenir compte des transferts de compensation et des dépenses de gestion et d'action sociale.

Les projections publiées en avril 2010 ont écarté cette notion pourtant plus proche de la réalité du poids du régime de retraite des fonctionnaires de l'Etat dans les comptes publics.

Le compte simplifié du régime des pensions civiles et militaires de retraite issu du jaune pensions PLF permet une lecture immédiate d'un tel résultat élargi :

contribution de l'Etat employeur 2000 (exécution) : 22,5 milliards d'euros

contribution de l'Etat employeur 2010 (PLF) : 35,2 milliards d'euros

évolution de l'effort de l'Etat entre 2000 et 2010 : 12,7 milliards d'euros soit 12,5 milliards d'euros en euros de 2008.

Deuxième réalité de l'évolution entre 2000 et 2010 de l'effort de l'Etat : solde technique avec pensions et cotisations réelles

En retraitant des mêmes comptes simplifiés les transferts de la partie emplois et les transferts et contributions des autres employeurs que l'Etat dans la partie ressources :

contribution de l'Etat employeur 2000 (exécution) : 24,2 milliards d'euros

contribution de l'Etat employeur 2010 (PLF) : 40,8 milliards d'euros

évolution de l'effort de l'Etat entre 2000 et 2010 : 16,6 milliards d'euros soit 16,4 milliards d'euros en euros de 2008.

Enjeu d'un écart entre le niveau théorique du solde technique et le niveau réel

Le régime de retraite des fonctionnaires est équilibré grâce à la contribution de l'Etat, qui globalement en déficit budgétaire, se finance par de la dette :

niveau de contribution de l'Etat en 2000 + 15,6 milliards d'euros = niveau de contribution de l'Etat en 2010 (en euros de 2008).

Si le COR avait fixé le solde technique du régime des fonctionnaires à zéro en 2010, tous les chiffres de déficit publiés par le COR seraient diminués de 15,6 milliards d'euros.

Inversement, si le COR avait fixé le solde technique du régime des fonctionnaires à zéro lorsque la contribution de l'Etat était nulle (ce qui n'est jamais le cas, puisqu'il faut bien, comme une entreprise privée, que l'Etat verse une contribution employeur, le tout étant une question de niveau), alors tous les chiffres de déficit seraient augmentés d'environ 24 milliards d'euros (voir deuxième réalité plus haut).

Vous comprenez ?

On peut estimer le niveau de contribution de l'Etat employeur en 2000 : 43,82 %/51,67 % de 28 944 ME (pensions), soit 24,5 MdE environ.

Avec 15,6 MdE (en euros 2008) d'évolution entre 2000 et 2010 selon le COR, le niveau de 2010 s'élève à 40,1 MdE.

Supposons qu'en fait le niveau réel de contribution de l'Etat employeur de 2010 soit inférieur à 40,1 MdE et que l'évolution entre 2010 et 2018 suive celle prévue par le COR.

Les déficits budgétaires des exercices 2011 à 2018 seront meilleurs que les déficits techniques projetés par le COR ! La réforme des retraites pourra apparaître plus efficace qu'escompté.

Supposons à l'inverse que le niveau réel de contribution de l'Etat employeur de 2010 soit supérieur à 40,1 MdE, l'évolution entre 2010 et 2018 suivant toujours celle du COR.

Les déficits budgétaires des exercices 2011 à 2018 seront pires que les déficits techniques projetés par le COR ! La réforme des retraites pourra apparaître moins efficace qu'escompté.

Dans les deux cas cela me gêne qu'un équilibre financier soit présenté en 2018 avec des chiffres qui ne correspondent pas à la réalité des dépenses budgétaires de l'Etat !

Mise à jour du chiffre de 15,6 milliards d'euros juste avant le vote de la loi réformant les retraites

Rappel de l'article 8 http://investigationfin.canalblog.com/archives/2010/10/18/19365647.html :

Des travaux parlementaires d'octobre 2010 montrent que l'effort de l'Etat ne sera pas de 15,6 MdE de 2011 à 2018, mais 14,7 MdE en 2011, 15,4 MdE en 2012 et 15,9 MdE de 2013 à 2018.

Comment se fait-il que ce qui était décrit comme l'augmentation des cotisations fictives de l'Etat employeur entre 2000 et 2010 puisse maintenant présenter des montants différents en 2011, 2012 et 2013-2018 ?

Soit X l'évolution de l'effort de l'Etat entre 2000 et 2010.

Si X = 15,9 MdE, cela signifie qu'en 2011 par exemple, la participation de l'Etat est moindre de 1,2 MdE. Soit pour 2011 et 2012 un cumul de 1,7 MdE. Ce qui viendrait alléger d'autant le déficit financier global de la réforme !

Si X =14,7 MdE, cela signifie qu'en 2013 par exemple, l'Etat participe davantage de 1,2 MdE. Soit de 2011 à 2018 un cumul de 7,9 MdE. Ce qui viendrait alourdir d'autant le déficit financier global de la réforme ! Une mauvaise nouvelle !

Dans les deux cas il y a comme une manipulation ...

Cette question a été posée à la Direction du Budget et au Ministère du Travail. Sans réponse.

A suivre, la partie 2 qui va encore plus loin ...

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