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Investigation Financière Economique et Boursière
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8 juillet 2010

Rapport de juin 2010 du Congrès sur AIG. Que se serait-il passé si AIG avait fait faillite ? Cas Société Générale. Partie I.

J'avais rédigé un article le 17 mars 2009 sur le sujet des versements de cash de l'assureur en difficulté AIG aux banques françaises, suite au plan de sauvetage du gouvernement fédéral américain lancé en septembre 2008.

J'avais plutôt conclu sur l'aspect impact significatif sur le résultat dans les comptes 2008 de la Société Générale et BNP Paribas.

Contreparties AIG. CDS Credit Default Swaps. Quel impact dans les comptes 2008 pour la Société Générale et BNP Paribas ?

http://investigationfin.canalblog.com/archives/2009/03/17/13012882.html

Ce qui ne voulait pas dire que si AIG avait fait faillite la Société Générale notamment n'aurait pas eu à subir de pertes importantes par la suite !

Les documents publiés récemment sur le site du Congrès (250 000 pages à http://documents.republicans.oversight.house.gov/E-mails-and-electronic-files/ et rapport à cop.senate.gov/documents/cop-061010-report.pdf) permettent de progresser sur cette problématique.

En l'état actuel de mes recherches, difficile de conclure sur le fait que la Société Générale ait pu éviter des milliards de dollars de pertes sans sauvetage d'AIG par le gouvernement américain.

Même les travaux du Panel du Congrès qui a rédigé le rapport ne sont pas explicites.

Un deuxième article sur le sujet exploitera une partie des 250 000 pages rendues publiques ainsi que les publications de la Société Générale sur le sujet.

Je crains de rester avec plus de points d'interrogations que de certitudes à l'issue des travaux accomplis, qui je l'espère vous permettront de progresser sur la connaissance ou la compréhension du sujet.

Plan de l'article :

I. Rappel des sommes reçues par la Société Générale au titre du plan de sauvetage d'AIG (extraits de mon article du 17 mars 2009)

II. Revue du rapport The AIG Rescue, Its impact on Markets, and the Government's Exit Strategy. Congressionnal Oversight Panel. 10 juin 2010

II.1) Précisions sur la nature des trois versements à la Société Générale liés au plan de sauvetage

II. 2) Combien ces titres RMBS (associés à ML 2) et CDO (associés à ML 3) valent-ils aujourd'hui ?

II 3) Estimation de pertes possibles par la méthode de la décote

II 4) Que se serait-il passé en cas de faillite d'AIG mi-septembre 2008 selon le Panel du Congrès ?

I. Rappel des sommes reçues par la Société Générale au titre du plan de sauvetage d'AIG (extraits de mon article du 17 mars 2009)

- 4,1 milliards de dollars de collatéral liés à des CDS de CDO ; versés à partir du 16 septembre 2008 ;

- 6,9 milliards de dollars de rachat par une entité Maiden Lane III des sous-jacents (CDO) des CDS pour les annuler ; versés à partir du 10 novembre 2008 ;

- 0,9 milliards de dollars liés à des opérations de prêts sur titres ; versés à partir du 18 septembre 2008.

Avec la découverte du rapport du 10 juin 2010 rédigé par un panel du Congrès américain, je dois admettre malheureusement que les conclusions de mon article n'étaient pas suffisamment pertinentes.

II. Revue du rapport The AIG Rescue, Its impact on Markets, and the Government's Exit Strategy. Congressionnal Oversight Panel. 10 juin 2010

II.1) Précisions sur la nature des trois versements à la Société Générale liés au plan de sauvetage

- 0,9 milliards de dollars liés au programme de prêts de titre d'AIG, versement par une entité Maiden Lane II à partir du 10 novembre 2008 (page 87) pour racheter les actifs RMBS du portefeuille de prêt de titres d'AIG.

Financement total de ML II 23,5 milliards de dollars, dont 22,5 de FRBNY et 1,0 de AIG ; valeur faciale (nominale) des titres rachetés au 31 octobre (page 267), 39,3 milliards de dollars (page 87) pour 43,8 Md$ réglés aux contreparties (page 88). Je n'explique pas la différence de 4,5 Md$ entre les deux ! Valorisation dans ML II le 31 octobre 2008 de 20,8 Md$ (page 272).

- 4,1 milliards de dollars versés en collatéral complémentaire de CDS de CDOs ; sur un total de 16,5 milliards de dollars (page 93), versés entre le 16 septembre et le 10 novembre 2008 (page 92), en prélude à Maiden Lane III.

- 6,9 milliards de dollars par l'entité Maiden Lane III ; versés entre le 10 novembre et le 3 décembre 2008 (page 92) ; les 4,1 milliards de dollars de collatéral versés au titre des appels de marge sur CDS des CDOs (rachetés par ML III) ont été conservés, de même que le collatéral versé préalablement au plan de sauvetage (5,5 milliards de dollars pour la SG, avant le 16 septembre 2008 page 92 et 18,8 Md$ pour l'ensemble page 93) ; le total collatéral versé avant ML III pour toutes les contreparties s'élevait à 35 milliards de dollars (page 91) ; la valeur de marché des CDOs rachetés s'élevait à environ 27,2 milliards de dollars (page 91) ; le total, 16,5 milliards de dollars pour la SG (page 92), 62 milliards de dollars pour les contreparties, était égal au nominal des contrats de CDS (page 91).

FRBNY a bien tenté de négocier avec les différentes contreparties (page 173), mais une seule, UBS, avait accepté un discount de 2 %. Les contreparties qui n'étaient pas en risque sur les titres avaient plus de pouvoir de négociation (page 173). Société Générale, selon un document de BlackRock, détenait environ 14 des 16 milliards de dollars des sous-jacents des CDOs.

Le collatéral versé pouvait être déterminé par deux facteurs pour beaucoup des contrats CDS d'AIG (page 255) :

- changement de valeur de la tranche super senior sujette à protection de crédit, plutôt que de l'évolution de la valeur du dérivé. Ainsi le collatéral n'était pas basé sur l'évolution du spread sur le CDS mais sur l'évolution du prix du sous-jacent.

- déclenchement d'appels de marge suite à des événements liés à des changements dans la notation de crédit.

Il ne faut donc pas selon moi raisonner trop à partir du collatéral versé pour avoir une idée sur la valorisation des CDS ou des CDO sous-jacents, et surtout pas les versements de collatéral supplémentaires probablement liés aux dégradations dans la notation d'AIG.

La différence entre ML II et ML III, c'est que dans le premier cas ML II a racheté les titres à AIG pour les vendre, dans le deuxième cas ML III a racheté les titres aux contreparties d'AIG, ce qui incidemment fournissait aux contreparties la valeur notionnelle de ces titres que ces contreparties détenaient en propre ou non (page 87).

Le total reçu par la SG s'élève donc à 17,4 milliards de dollars dont :

- 5,5 Md$ de collatéral avant le plan de sauvetage ;

- 11,9 Md$ au titre du plan de sauvetage.

II. 2) Combien ces titres RMBS (associés à ML 2) et CDO (associés à ML 3) valent-ils aujourd'hui ?

- ML II Au 31 mars 2010, la valeur de marché estimée par la Réserve Fédérale est de 16,2 milliards de dollars (page 89). Valeur de marché le 12 décembre 2008 de 20,8 milliards de dollars (page 272).

AIG a réglé les contreparties en totalité, pour 39,3 milliards de dollars des titres RMBS valorisés en novembre 2008, ces titres étant valorisés par financement alors 19,5 milliards de dollars (décote de 50 % environ page 169)

Le prêt de la BRBNY présentait un surplus de collatéral (overcollateralized).

La Société Générale a reçu 0,9 milliards de dollars et BNP Paribas 4,9 milliards de dollars au titre de ML II.

A supposer qu'AIG ait fait faillite et que la Société Générale ait eu à supporter une décote analogue de 50 % sur les 0,9 milliards de dollars reçus, alors la perte pouvait être estimée à 0,45 milliards de dollars. Notons que BNP Paribas aurait-elle évité une perte estimée à 2,25 milliards de dollars !

Bizarrement, le Panel estime que la participation du gouvernement dans ML II est à l'équilibre (is currently in the money) page 169. Omettant le fait que les dollars versés aux contreparties sont bien supérieurs à cet équilibre apparent !

- ML III Au 31 mars 2010, la valeur de marché estimée par la Réserve Fédérale est de 23,7 milliards de dollars (page 94).

L'entité ML III a retourné à AIGFP 2,5 milliards de dollars de collatéral surpayé (page 93).

Ainsi, le nominal de 62,5 Md$ moins le remboursement de 2,5, soit 59,7 Md$ sont valorisés avec une décote d'environ 60 % le 31 mars 2010 !

A supposer qu'AIG ait fait faillite et que la Société Générale ait eu à supporter une décote analogue de 60 % sur les 16,5 milliards de dollars reçus, alors la perte pouvait être estimée à 4,4 milliards de dollars :

nominal de 16,5 moins le collatéral reçu avant le plan de sauvetage 5,5 moins la valorisation estimée des CDO (60% de décote) 6,6

Bizarrement à nouveau (comme pour ML II), le raisonnement du Panel consiste à affirmer que la valorisation de ML III (23,7 Mf$ page 205) excède le prêt restant de FRBNY plus le financement par AIG. Omettant le fait que les dollars versés aux contreparties sont bien supérieurs à la valeur reçue dans ML III (page 171). Néanmoins le Panel tempère enfin son propos page 205, en évoquant les 35 milliards de dollars de collatéral retenus par les contreparties.

En page 206 :

Hence, from this perspective, more than $52 billion of the $62 billion par value received by those counterparties was direct or indirect government assistance, assistance which it is highly unlikely that ML3 will ever fully recover despite the rebound in the value of the CDOs since the time they were initially acquired by the SPV.

Les 52 Md$ s'obtiennent par addition des 35 Md$ et 17,3 (prêt au SPV), vision FRBNY et gouvernement.

II 3) Estimation de pertes possibles par la méthode de la décote

Au total, par cette méthode, la Société Générale aurait pu encourir un peu moins de 5 milliards de dollars de pertes si AIG avait fait faillite :

Cette approche est acceptable en théorie mais pas forcément pertinente pour autant.

Elle doit être tempérée ou précisée par les remarques suivantes :

- les détails des transactions passées par les contreparties de premier niveau (Goldman Sachs, Société Générale) avec des contreparties de second niveau n'ont pas été portés à la connaissance du Panel ; les termes contractuels auraient pu différer sensiblement des termes du dénouement avec AIG, ce qui aurait pu générer un profit pour les contreparties de premier niveau (page 110).

Le rapport évoque également les contreparties qui détenaient encore les titres et qui n'étaient pas totalement couvertes, en cas de faillite elles auraient supporté le risque total des titres dans leurs comptes (page 157).

Ce qui semble infirmer l'approche par décote de valorisation des CDO et RMBS.

- des contreparties (Goldman Sachs est cité, page 174 également) ont pris des protections additionnelles avec d'autres contreparties contre la défaillance d'AIG sous forme de CDS et autres couvertures. Ces dernières contreparties auraient donc pu également bénéficier du sauvetage d'AIG. GS a refusé de fournir le nom de telles entités (page 111). Goldman Sachs aurait affirmé qu'ils n'auraient rien à perdre.

Mais ce qui diminue d'autant le gain éventuel pour les contreparties connues.

- dans la cas de ML III, l'impact d'une faillite pouvait dépendre de la détention sur la durée des sous-jacents aux CDO couverts par les CDS (page 122). Le rapport évoque l'hypothèse selon laquelle les contreparties auraient pu bénéficier d'une vente des CDOs à un moment où leurs cours auraient remonté par rapport à la valorisation retenue lors de l'opération Maiden Lane III (page 122).

Ce n'est pas tellement ce que l'on observe en moyenne au 31 mars 2010 au regard de la valorisation de l'entité ML III ! 23,7 Md$ au 31 mars 2010 pour 62 Md$ réglés aux contreparties valorisés 27,2 Md$ !

Pourtant, le rapport écrit : Thus, it is likely that some of the counterparties would have been better off in bankruptcy if they continued to hold the CDOs in light of the increase in the valuation of the ML3 securities.

Le conseil BlackRock de BRBNY, qui a effectué des analyses de valorisation des titres selon différents scénarii, a estimé que les titres prendraient de la valeur s'ils étaient détenus plus longtemps (page 169).

- dans le cas de ML III également, l'impact pouvait dépendre du fait que les appels de marge était surévalués ou sous-évalués par rapport à la valorisation des CDS (page 122)

- dans le cas de ML III toujours, les CDS auraient pu être détenus pour le compte des clients des contreparties. C'est ce qua affirmé le Directeur financier de Goldman Sachs, David Viniar (page 174). Ce qui selon le Panel, n'aurait pas éliminé tout risque en cas de faillite d'AIG.

Compte propre ou compte client ? Défaut d'AIG couvert ou non ? Sans davantage de réponses à ces questions, difficile d'appréhender correctement les pertes potentielles qu'aurait pu subir la Société Générale en cas de faillite d'AIG.

II 4) Que se serait-il passé en cas de faillite d'AIG mi-septembre 2008 selon le Panel du Congrès ?

page 76 :

De manière générale, cet événement aurait constitué un événement de défaut pour divers contrats de dérivés d'AIG, mais cela aurait arrêté le versement des appels de marge exigés par les contreparties de ces dérivés. Le collatéral versé préalablement aurait été conservé par les contreparties, qui auraient, en cas de réclamations de leur part, été forcées à négocier une décote substantielle.

page 78 :

Mais le rapport affirme que l'impact d'une procédure de faillite d'AIG sur les contreparties et sur le système financier n'est pas clair.

page 105 :

Plus précisément, le rapport indique qu'il est impossible d'identifier le bénéfice tiré par chaque créditeur d'AIG du plan de sauvetage.

page 278 :

Le rapport tente un raisonnement général de l'impact d'une faillite ou du sauvetage selon les hypothèses suivantes :

- RMBS ou CDO

- les contreparties détiennent en propre les instruments financiers

- les contreparties ont reçu plus de collatéral (cas général des contreparties ML III page 122, 2,5 Md$ ayant été retournés) que nécessaire ou pas assez (la plupart des contreparties ML III seraient dans ce cas, car les appels de marge étaient calculés à mi-valorisation page 122, ce qui contredit l'autre citation de la page 122, comprenne qui pourra !).

C'est très général.

Le cas des CDS de CDO de la Société Générale concerne plutôt les hypothèses complètement collatéralisées et propriétaire des titres CDO sous-jacents aux CDS.

A retenir dans un tel cas, le principe selon lequel en cas de faillite la contrepartie aurait été en mesure de mettre un terme aux contrats de CDS, de retenir le collatéral posté et de recevoir la valeur estimée des CDS. L'assurance sur les CDOs aurait disparu et la contrepartie aurait été exposée à la baisse de la valorisation des CDOs. Ce qui n'était pas le cas avec ML III du plan de sauvetage.

A suivre !

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