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Investigation Financière Economique et Boursière
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4 mars 2010

Minoration de la dette grecque via des entités luxembourgeoises. Du vent relativement à d'autres corrections.

Dans cet article vous comprendrez mieux :

- pour combien, quand et comment Eurostat et l'Etat grec ont agi relativement aux opérations de titrisation qui ont impacté la dette publique grecque ; la Grèce a corrigé dès 2002 sur cet aspect ;

- le caractère non significatif sur la dette grecque de ce sujet relativement à d'autres corrections ;

- les difficultés de rapprocher les données Eurostat entre elles sur la dette grecque.

Retour sur les déclarations de certains médias sur la minoration par la Grèce de sa dette publique

Dans l'article du New York Times du 13 février 2010, les auteurs affirment que les deals de la Grèce du type titrisation des revenus futurs de la loterie nationale (deal Ariadne en 2000) ou de ceux des taxes d'atterrissage dans les aéroports (deal Aeolos en 2001) n'étaient pas comptabilisés en tant que prêts, minorant les engagements du pays. L'article précise qu'en 2002 les règles de comptabilisation de tels deals ont changé forçant les gouvernements à retraiter de tels deals de cessions à prêts.

http://www.nytimes.com/2010/02/14/business/global/14debt.html?scp=2&sq=greece&st=cse

Dans un article en ligne sur le Financial Times en date du 25 février 2010, l'auteur prétend que la Grèce n'a pas retraité les deals car ils ont été effectués avant le changement de règle en 2002. L'article se termine en posant la question pourquoi Eurostat n'a pas poursuivi la Grèce sur le sujet.

http://ftalphaville.ft.com/blog/2010/02/25/159011/details-on-those-other-greek-debt-deals/

Enfin dans un article du Financial Times du 16 février 2010, un officiel grec cité affirme que les règles ont changé après 2004, quand les titrisations ont été enregistrées dans la dette publique.

http://www.ft.com/cms/s/0/1deb8586-1a9a-11df-bef7-00144feab49a.html?nclick_check=1

Ces incohérences, je les avais soulignées dans un article précédent sur le sujet de la dette grecque : Inventaire des opérations de titrisation de l'Etat Grec dans les années 2000. Agences de notation et BNP Paribas.

http://investigationfin.canalblog.com/archives/2010/03/03/17110784.html

Les informations nécessaires pour appréhender l'impact de ces deals sur la dette grecque sont disponibles sur le site Eurostat.

J'ai retenu notamment deux rapports :

1) rapport du 22 novembre 2004 par Eurostat sur la révision des chiffres du déficit et de la dette du gouvernement grec. http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/GREECE/EN/GREECE-EN.PDF

2) rapport du 8 janvier 2010 par Eurostat sur les statistiques de déficit et de la dette du gouvernement grec et ses six annexes.

http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/COM_2010_REPORT_GREEK/FR/COM_2010_REPORT_GREEK-FR.PDF

1) rapport du 22 novembre 2004 par Eurostat sur la révision des chiffres du déficit et de la dette du gouvernement grec :

Les révisions sur la dette grecque figurant dans le rapport du 22 novembre 2004 concernent la période 1997 à 2003 :

1997 5,7 MdE

1998 7,0 MdE

1999 8,0 MdE

2000 7,9 MdE

2001 8,1 MdE

2002 7,9 MdE

2003 7,3 MdE

La plus grande part des révisions provient des intérêts capitalisés et de la consolidation des actifs de la sécurité sociale.

Une révision en 1999 a concerné les obligations échangeables en actions, la dette publique ayant été accrue de 775 millions d'euros (contrairement à ce qui est écrit dans l'annexe 12 selon laquelle il n'y aurait pas eu de révision rétroactivement en 1999).

On y apprend également qu'Eurostat a publiquement émis des doutes sur les chiffres de déficit et de dette transmis par les autorités grecques depuis 2002, doutes concrétisés dans un communiqué de presse n°35/2002 le 21 mars 2002 et n° 116/2002 le 30 septembre 2002.

A la suite de ces réserves, le gouvernement grec a transmis en novembre 2002 une correction de la dette publique de + 1,5 % du PIB au titre de 2000 (soit environ 2,1 MdE) et de + 1,9 % du PIB au titre de 2001 (soit environ 2,8 MdE).

La raison principale de telles augmentations consistait à inclure les obligations convertibles en actions émises par des entités spéciales (SPV Special Purpose Vehicles) basées au Luxembourg, dans un contexte d'opérations de titrisation menées par le gouvernement grec.

Les retraitements sur le déficit sont inférieurs à 100 millions d'euros en 2000 et en 2001. La dette a été augmentée à fin septembre 2002 et de manière rétroactive jusqu'en 1998.

Eurostat considère dans son rapport que la comptabilisation est dorénavant correcte sur le sujet.

La voilà notre réponse : Eurostat s'est plaint en 2002 et la Grèce a rectifié dès le mois de novembre 2002 sur le sujet.

Lequel n'en est par conséquent pas un, comme je le suggérais dans mon précédent article.

Eurostat a poursuivi ses réserves en mars 2004, la Grèce a révisé ses chiffres en mai 2004, mais il s'agit d'autres problématiques (pour la dette une révision du PIB !).

La révision la plus importante a eu lieu en septembre 2004, afin de tenir compte de la sous-estimation de la dette en rapport avec les obligations aux intérêts capitalisés et de la sur-estimation de la consolidation des actifs de sécurité sociale.

2) rapport du 8 janvier 2010 par Eurostat sur les statistiques de déficit et de la dette du gouvernement grec et ses six annexes :

On y apprend qu'en 2005 Eurostat a effectué des visites en Grèce pour vérifier les données du déficit et de la dette sur les sujets principaux des engagements des hôpitaux, des prises en charges de dette par une autre entité, des subventions européennes et des swaps.

Eurostat a exprimé 5 réserves entre 2005 et 2008 sur la qualité des données fournies lors des procédures grecques pour déficit excessif.

Le sujet des swaps ne faisait pas partie du rapport de 2004. L'annulation d'un swap dans la notification de procédure pour déficit excessif du 21 octobre 2009 a augmenté le déficit 2008 de 210 millions d'euros. Eurostat poursuit mais n'évoque pas d'impact du sujet swaps sur la dette, juste sur le déficit.

Le sujet des prises en charges de dette par d'autres entités pourrait, selon Eurostat, conduire à des révisions antérieures à nouveau à 2004.

DEKA (l'entité créée en 1997 pour privatiser) a été reclassée en entité gouvernementale dès septembre 2002 (selon l'annexe 1, 2003 selon le rapport).

Rapprochement entre les données chiffrées de retraitement et de dettes brutes d'Eurostat avec l'inventaire des deals et les données trimestrielles du gouvernement grec

L'étude des bulletins trimestriels sur la dette publique de la République Hellénique (Hellenic Republic Public Debt Bulletin) n°27 (septembre 2002) et 28 (décembre 2002) confirme l'inclusion à partir de fin septembre 2002 des privatisations certificats et titrisations, sans pour autant que l'on puisse extraire le montant de l'impact dans l'évolution de la dette de trimestre à trimestre.

Dans mon premier article, j'avais totalisé les différentes opérations de titrisation par le gouvernement grec dans les années 2000. Le chiffre obtenu pour les 9 deals s'élevait à 6,4 milliards d'euros : Ariadne SA, Aeolos SA, Atlas Securitisation SA, Hellenic Finance SCA 1 à 3, Hellenic Securitisation SA 1 et 2, Hellenic Exchangeable Finance SCA.

Ces 6,4 milliards d'euros sont supérieurs à la révision sur la dette 2001 (+ 1,9 points de PIB) que j'ai calculée en valeur à 2,8 milliards d'euros.

Et pourtant ces 9 SPV sont bien luxembourgeoises et correspondent bien aux entités concernées par la correction effectuée en novembre 2002 par la Grèce.

Enfin, comparons, de 1997 à 2008 les chiffres de dettes publiées par Eurostat et les chiffrées initiaux publiés par l'état grec avec les données chiffrées issues des deux rapports Eurostat :

Rappelons que la Grèce a intégré la zone Euro le 1er janvier 2001.

 

Eurostat

Grèce

Grèce

Eurostat

Eurostat

en milliards d'euros

Dette brute des administrations publiques (a)

Outstanding central government debt (b)

General government debt (b)

Première notification (c)

Dernière notification (c)

31.12.1997

114,9

114,6

105,2

105,7

110,9

31.12.1998

115,7

121,9

111,0

112,6

118,9

31.12.1999

122,3

129,2

117,0

117,6

126,6

31.12.2000

141,0

139,2

124,8

143,3

157,2

31.12.2001

151,9

145,7

130,0

146,0

167,5

31.12.2002

159,2

166,1

 

164,3

173,4

31.12.2003

168,0

177,8

 

176,6

168,8

31.12.2004

183,2

201,2

 

205,3

183,2

31.12.2005

195,4

215,4

 

210,0

195,4

31.12.2006

204,4

226,2

 

220,1

204,4

31.12.2007

216,4

239,7

 

214,0

216,5

31.12.2008

237,2

262,1

 

233,4

237,2

31.12.2009

 

298,5

     

Sources

(a) Eurostat table Teina 220FlagDesc Dette Pub.xls

(b) Hellenic Republic Public Debt Bulletin

(c) calcula à partir des tables du rapport du 22 novembre 2004 et du rapport du 8 janvier 2010, table PIB Eurostat_Table PIB_tec00001FlagDesc.xls

Un premier objectif étant de comparer d'une part les données officielles Eurostat avec les calculs effectués à partir des rapports Eurostat, on observe :

- de fin 2004 à fin 2008 une cohérence ;

- de fin 1997 à fin 2003, des écarts importants, sauf fin 2003, les chiffres du ficher Eurostat étant souvent bien inférieurs. Ils seraient d'ailleurs plus comparables (sans être identiques) aux données chiffrées de première notification

Un deuxième objectif consiste à comparer les données initiales communiquées par le gouvernement grec avec les chiffres de notification initiale obtenus à partir des rapports Eurostat :

- de fin 1997 à fin 1999, ce sont les chiffres de la dette générale (retraitent de la dette centrale par annulation des dettes comptées deux fois, ce qui semble logique)qui se rapprochent le mieux de la première notification Eurostat, mais ces données ne sont plus fournies par la Grèce dès fin 2002.

- pour fin 2000 et fin 2001 ce sont plutôt les données chiffrées de la dette centrale (celle qui n'élimine pas les doublons) qui concorde avec la première notification Eurostat ;

- idem de fin 2001 à fin 2003 ;

- écart d'environ 5 MdE entre fin 2004 et fin 2006 en valeur absolue ;

- écart énorme fin 2007 et fin 2008 !

Le rapprochement n'est par conséquent pas satisfaisant.

Les données publiées par Eurostat sur la dette publique de la Grèce sont-elles bien cohérentes avec les chiffres que l'on peut obtenir à partir de rapports même d'Eurostat ?

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