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Investigation Financière Economique et Boursière
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22 décembre 2009

Partie II Les aides de l'Etat aux banques. La SFEF ne rapporte pas tant que ça à l'Etat et ne coûte pas tant que ça aux banques.

Après avoir bénéficié fin 2008 de la prise de participations de l'Etat dans leur capital, les banques aidées ont décidé d'y mettre fin un an après environ.

Le 14 décembre 2009, le Président Nicolas Sarkozy a annoncé en conférence de presse de présentation du grand emprunt que les remboursements anticipés par les banques de 13 milliards d'euros serviraient à financer une partie du grand emprunt.

Le 29 juin 2009 la Cour des comptes avait publié un rapport de 135 pages intitulé Les Concours publics aux établissements de crédit : Premier constats, premières recommandations.

Dans la première partie nous nous sommes intéressés à la SPPE. http://investigationfin.canalblog.com/archives/2009/12/21/16236471.html

Ce deuxième article concerne la SFEF, mais également les garanties apportées à Dexia, afin de recouper correctement les intérêts versés à l'Etat.

Présentation de la SFEF

La SFEF, Société de Financement de l'Economie Française, est une société dont les statuts ont été adoptés en assemblée générale du 20 novembre 2008 et agréée par arrêté ministériel du même jour.

D'après le rapport de la Cour des comptes de fin juin 2009, la SFEF est détenue à 34 % par l'Etat et majoritairement par sept établissements de crédit (les 6 principales banques plus HSBC). Les ressources humaines de la SFEF sont fournies par les établissements de crédit, et la société fonctionne par délégations de gestion.

Le mécanisme est le suivant : la SFEF émet du papier noté triple AAA en raison de la garantie de l'Etat afin de prêter à différents établissements de crédit. Afin de sécuriser de tels prêts, la SFEF exige un collatéral.

Le mécanisme des émissions de la SFEF est plafonné à 265 milliards d'euros, la durée du dispositif est limitée au 31 décembre 2009.

L'arrêté du 20 octobre 2008 précise les modalités d'admission en sûreté des éléments d'actifs mobilisés par les établissements de crédit, par exemple le fait que 75 % du capital restant dû est appliqué aux prêts assortis d'une hypothèque ou privilège de premier rang.

L'intérêt pour les banques ? Garantir une partie de leurs financements.

L'intérêt pour l'Etat ? Ces garanties rapportent des intérêts.

Tableau des émissions de la SFEF

Date émission

Montant

Devise

Taux

Durée

Marge

1

12.11.08

5 000

3,50 %

3 ans

5 pb > mid swap

2

01.12.08

6 000

3,00 %

2 ans

4 pb > mid swap

3

09.12.08

2 000

Euribor - 5 bp

2 ans

4

07.01.09

5 000

3,25 %

5 ans

15 pb > mid swap

5

23.01.09

6 000

$

2,13 %

3 ans

40 pb > mid swap

6

03.02.09

6 000

2,25 %

2 ans

9 pb > mid swap

7

18.02.09

5 500

$

2,00 %

2 ans

45 pb > mid swap

8

03.03.09

6 000

2,37 %

3 ans

15 pb > mid swap

9

16.03.09

4 000

$

2,38 %

3 ans

50 pb > mid swap

10

30.03.09

5 000

3,00 %

5 ans

37 pb > mid swap

11

15.04.09

3 000

$

1,50 %

1 an 1/2

30 pb > mid swap

12

22.04.09

7 000

$

3,38 %

5 ans

37 pb > mid swap

13

11.05.09

5 000

2,13 %

3 ans

10 pb > mid swap

14

02.06.09

6 000

$

2,25 %

3 ans

25 pb > mid swap

15

22.06.09

5 000

3,13 %

5 ans

25 pb > mid swap

16

01.07.09

2 000

CHF

3 months CHF Libor

2 ans

17

08.07.09

3 000

3 months CHF Libor + 5 bp

3 ans

18

08.07.09

3 000

$

3 months USD Libor + 5 bp

3 ans

19

08.07.09

750

£

3 months CHF Libor + 5 bp

3 ans

20

16.09.09

4 500

$

2,88 %

5 ans

18 bp > mid swap

Données chiffrées des émissions en millions d'euros

sources : rapport de Mayer Brown du 8 septembre 2009 Summary of Government Interventions in Financial Markets, rapport de la Cour des comptes de juin 2009, articles de presse.

D'après le rapport de Mayer Brown, les émissions 17 et 19 montrent une rémunération indexée sur le Libor en francs suisses alors que les émissions sont respectivement en euros et en livres sterling, ce qui est étonnant. Pour certaines émissions ce rapport a été la seule source disponible et accessible.

Totalisation des émissions de la SFEF :

48 milliards d'euros

39 milliards de dollars

750 millions de livres sterling

2 milliards de francs suisses

Le rapport de la Cour des comptes de juin 2009 indiquait un total au 15 juin 2009 d'encours de la SFEF de 63 milliards d'euros, qui correspond bien au total des quatorze premières émissions de la SFEF, pour 62,8 milliards d'euros, après conversion des émissions en devises.

D'après l'Agefi du 2 septembre 2009, l'encours de la SFEF, qui ne devrait dorénavant plus émettre, s'élèverait à 75 milliards d'euros. http://www.agefi.fr/articles/La-SFEF-devrait-bientot-arreter-demettre-1105536.html. En fait une 20 ème émission suit, le 16 septembre 2009, et j'estime l'encours en euros avec conversion des devises aux cours du 18 décembre 2009 à 77,4 milliards d'euros.

Selon cet article, la SFEF ne disparaîtrait pas avec l'arrêt d'émission d'obligations, elle serait maintenue en vie jusqu'à l'arrivée à échéance des obligations émises, c'est-à-dire en 2014.

De plus, cet encours n'alourdira pas la dette au sens de Maastricht selon l'Agefi du 17 juillet 2009 http://www.agefi.fr/articles/La-SFEF-viendra-alourdir-fardeau-dette-publique-1101373.html.

Tableau des banques aidées par la SFEF

Banque

Au 31 mars 2009

Coût de la garantie CDS

Marge 20 pb

Total coût

BNP Paribas

6,761

0,312 %

0,200 %

0,512 %

Société Générale

7,018

0,312 %

0,200 %

0,512 %

Crédit Agricole

12,654

0,361 %

0,200 %

0,561 %

Caisses d'épargne

6,333

0,418 %

0,200 %

0,618 %

Banque Populaire

4,053

0,418 %

0,200 %

0,618 %

Crédit Mutuel

6,879

0,200 %

0,200 %

S/T

43,698

94,9 %

General Electric

0,414

0,537 %

0,200 %

0,737 %

3 CIF (Crédit Immobilier)

0,441

0,500 %

0,200 %

0,700 %

Laser Cofinoga

0,142

0,418 %

0,200 %

0,618 %

PSA Finance

0,476

RCI Banque (Renault)

0,839

S2 Pass (Carrefour)

0,035

VFS Finance (Volvo)

0,009

S/T

2,356

5,1 %

Total

46,054

Données chiffrées en milliards d'euros

source : rapport de la Cour des comptes de juin 2009

Le total de 46,05 milliards d'euros est à rapprocher de l'encours des émissions de la SFEF au 31 mars 2009, soit 46,7 milliards d'euros (après conversion des émissions en dollars), ce qui est cohérent, à première vue.

Les 6 principales banques qui ont bénéficié de 100 % des aides aux fonds propres par la SPPE représentaient 95 % des prêts garantis par la SFEF au 15 juin 2009.

Ce que rapporte la SFEF

Qu'ont rapporté ou que vont rapporter en 2008 et 2009 les prêts garantis aux banques ?

1) Incertitude sur le chiffre des 2 %de frais d'émission annoncé par la Cour des Comptes

D'après le rapport de la Cour des Comptes, au 3 avril 2009 le montant total des financements versés s'est élevé à près de 46 milliards d'euros, déduction faite des frais d'émission qui représenteraient environ 2 %.

Ce chiffre de 46 milliards dont le détail est fourni banque par banque dans le tableau précédent.

Problème, au 3 avril 2009, le total des encours SFEF s'élève à 46,67 milliards d'euros, ce qui représente une différence de 620 millions d'euros, soit 1,33 %. 2 % théoriques de frais d'émission représentent 933 millions d'euros, soit un écart de plus de 300 millions d'euros.

Soit ma conversion des encours en dollars (cours utilisé de 1,3282 $ pour 1 euro) est erronée.

Soit le chiffre de 2 % annoncé par la Cour des comptes est supérieur à la réalité.

Soit la SFEF a plus prêté qu'elle n'a émis au 31 mars 2009. Cela m'étonnerait.

2) Constitution théorique du taux de rendement des titres émis

D'après la Cour des comptes, le taux des prêts accordés par la SFEF aux banques est égal aux coûts de l'émission, auxquels s'ajoutent le coût de la garantie de l'Etat et la marge de 20 points de base, soit en moyenne 4 %.

Dans le coût de la garantie de l'Etat figurerait la prime de risque (risque de défaut de chaque établissement) qui va de 31 points de base à 54 points de base.

Lorsqu'on regarde les taux de rémunération des différents titres émis par la SFEF, ils se situent dans une fourchette de 1,5 à 3,5 %.

Pour obtenir une moyenne de 4 % et en retranchant 0,6 % (20 points de base et une moyenne de 40 points de base de garantie de l'Etat), cela donne 3,4 %, auxquels il faut retrancher les coûts de l'émission, qui ne peuvent être de 2 %, ce qui donnerait 1,4 %, qui est inférieur à la fourchette fournie plus haut de 1,5 à 3,5 %.

Le chiffre de 2 % de coûts d'émission annoncé par la Cour des comptes ne me semble donc pas pertinent.

3) Information supplémentaire sur la SFEF

D'après le rapport de la Cour des comptes, la SFEF est un véhicule d'émission de place qui répercute l'ensemble de ses coûts aux établissements de crédit bénéficiaires sans réaliser aucune marge.

Je remarque que de tels coûts sont déductibles et viennent théoriquement amputer l'impôt sur les bénéfices du tiers de leur montant par conséquent.

La Cour des Comptes ajoute que le dispositif permet à l'Etat de faire rémunérer la garantie octroyée, tous les produits nets de charges lui étant acquis bien que n'étant actionnaire qu'à 34 %.

La Cour recommande toutefois d'asseoir la rémunération de sa garantie sur les CDS postérieurs à août 2008 afin d'accroître cette recette.

4) Cadrage avec les commissions publiées

La Cour des Comptes estime les commissions de garanties à 1 280 millions d'euros pour 2008 et 2009.

Dans certaines situations mensuelles budgétaires de l'année 2009 (février, mars, avril et mai) figurent les commissions de garantie encaissées par l'Etat au titre de la SFEF. Mais les chiffres publiés incluent les commissions de garantie apportées à Dexia.

Heureusement certains rapports de Dexia indiquent le coût de la garantie avant impôt pour Dexia :

- 78 millions d'euros au premier trimestre 2009 ;

- 143 millions d'euros au deuxième trimestre 2009.

Ce qui correspond environ à un coût pour Dexia de 50 points de base du niveau des encours garantis (89,8 milliards d'euros au 30 juin 2009 après 59,2 milliards d'euros au 31 décembre 2008), qui évoluent jour après jour.

A partir du fichier des encours quotidiens, en appliquant une commission estimée de 50 points de base, le coût pour Dexia de la garantie par l'Etat est alors estimé pour 2008 à 40 millions d'euros, et pour le 31 mai 2009 (pour 2009) à 113 millions d'euros, chiffre qui servira plus bas.

5) Cadrage avec les commissions publiées 31 mai 2009 et ou 15 juin 2009

Dans un rapport préparatoire de juin 2009 au débat d'orientation des finances publiques, on apprend que l'Etat aurait perçu 168 millions d'euros de commissions au titre des garanties de la SFEF en 2008 et 847,8 millions d'euros en 2009 pour 63 milliards d'euros de prêts.

Le document a été créé le 24 juin 2009, les chiffres pour 2009 s'appuient probablement sur la situation à fin mai 2009. Mais comme l'encours de 63 milliards d'euros correspond à la situation au 15 juin 2009, estimons plutôt qu'il s'agit de la situation à cette dernière date.

La situation mensuelle budgétaire du 31 mai 2009 faisait apparaître un total de 901 millions d'euros. En retranchant les commissions de garantie estimées sur Dexia de 113 millions d'euros, on obtient une part SFEF de 788 millions d'euros. On est pas trop éloigné du total de 848 millions d'euros avec 15 jours en moins.

6) Cadrage avec les commissions publiées 2008

Pour 2008, il y avait 3 émissions, 49 jours à 3,5 % pour 5 000 ME, 31 jours à 3 % pour 6 000 ME, et 22 jours à Euribor - 5 bp (mettons 3,5 %), cela donne environ 44 millions d'euros de commissions. On est loin des 168 millions qu'aurait perçu l'Etat en 2008 ! Même si on rajoute un coût d'émission de 2 %, alors on obtient 70 millions d'euros.

7) Cadrage avec les commissions publiées au 31 mars 2009

Adoptons la même démarche au 31 mars 2009.

La situation mensuelle budgétaire de l'Etat du 31 mars 2009 indiquait un total de commissions 2009 SFEF + Dexia de 337 millions d'euros. La part SFEF est par conséquent égale à 259 millions d'euros.

Ces 259 millions d'euros correspondent-ils bien à une marge de 20 points de base + la moyenne estimée de la garantie d'Etat au 31 mars 2009 ?

Si on applique prorata temporis aux émissions de la SFEF (qui certes totalisent fin mars 46,7 milliards d'euros alors que les banques ont bénéficié en net de 46,05 milliards d'euros de prêts garantis) les taux de rémunération des titres émis (exemple 3,5 % pour la première émission du 12 novembre 2008), alors on obtient 247 millions d'euros.

On est pas loin des 259 millions d'euros de la situation mensuelle budgétaire. Mais ce n'est pas normal !

En observant le détail du total du coût de la garantie des CDS et de la marge de 0,20 points de base qui sont connus la plupart des banques aidées, alors on peut calculer la moyenne pondérée à 0,56 % ce qui, pour le 31 mars 2009 fournirait une marge prorata temporis des encours SFEF de 48 millions d'euros.

Et en année pleine 2010 ? 0,56 % de 77,4 milliards d'euros donnent 433 millions d'euros.

Je le concède, cela fait beaucoup de chiffres.

Mais les rares qui auront suivi pourront se rendre compte tout comme moi que la question de la compréhension des commissions encaissées par l'Etat au titre de la SFEF et publiées pose problème :

- les chiffres publiés rendent-ils compte uniquement de la marge de 20 points de base et du coût de la garantie de l'Etat ? J'en doute.

- les chiffres publiés rendent-ils compte du taux brut des prêts aux banques sans retrancher le taux servi pour les titres émis par la SFEF ? Possible, bien que le cadrage ne soit pas totalement satisfaisant. Une telle présentation brute surestime le gain réel pour l'Etat ! Estimé à seulement 433 millions d'euros en année pleine 2010 !

8) Estimation du gain pour les banques

La Cour des comptes estime à 40 points de base l'amélioration pour les banques de leurs conditions de financement par le biais de la SFEF.

La Cour estime à 180 millions d'euros pour un encours de 46 milliards d'euros le gain pour 2009 et 370 millions d'euros pour un encours de 93 milliards d'euros estimé fin 2009.

Mes calculs montrent plutôt une amélioration de 236 millions d'euros pour 2009 (conversion des devises aux cours du 18 décembre 2009), sachant que l'encours converti à cette datte est plutôt de 77,4 milliards d'euros et que le dollar s'est déprécié en 2009.

C'est en année pleine 2010 que cette amélioration est intéressante à estimer. Mes calculs donnent 310 millions d'euros avec les cours du 18 décembre 2009.

On est pas loin de l'estimation de ce que rapporte l'émission des titres SFEF à l'Etat, de 433 millions d'euros !

Quelles banques participent à l'élaboration du livre d'ordres ?

Pour les émissions en euros, on retrouve souvent BNP Paribas, CaLyon, HSBC, Natixis, Société Générale.

Pour les émissions en dollars les banques internationales rentrent dans la partie : Deutsche Bank, JP Morgan, Barclays, Citi, Morgan Stanley, Goldman Sachs.

Ainsi, l'impact sur le résultat avant impôt des banques n'est pas si défavorable que cela mais souffre d'incertitudes :

- les commissions encaissées par l'Etat seraient de 848 millions d'euros au 15 juin 2009 ; 1 280 millions d'euros estimés pour 2008 et 2009 ; mais si on ne considère que la marge de 20 points de base et le coût de la garantie de l'Etat, l'impact en année pleine 2010 est de 433 millions d'euros ;

- l'amélioration des conditions de financement grâce à la SFEF se traduirait selon mes calculs par un gain estimé à 310 millions d'euros en année pleine 2010 ;

- une partie des banques aidées participe aux émissions SFEF et encaisse des commissions, le total estimé étant au maximum de 2 % (% probablement surévalué) de 1 500 millions d'euros ou 750 millions d'euros à 1 % de frais d'émission, uniquement en 2008 et 2009.

9) Qui achète les émissions de la SFEF ?

L'information est rare mais obtenue pour l'émission 6 (50 % les banques elles-mêmes ! 10 % les institutionnels 10 % les gérants d'actifs) et pour l'émission 10 (51 % banques 22 % gestion d'actifs 13 % banques centrales et institutions officielles 8 % assurances).

Y a-t-il des banques aidées par la SFEF qui se payent le luxe d'acquérir les titres émis par la SFEF, de toucher des commissions de mouvement ou même de spéculer dessus ?

Conclusion, cela ne rapporte pas tant que ça à l'Etat et cela ne coûte pas tant que ça aux banques !

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Commentaires
V
Je pense que les aides de l'Etat en faveur des sociétés privées ne correspondent pas du tout au principe du capitalisme libéral. De plus, dans le cas des banques françaises, je pense que ça a beaucoup aidé. Mais dans la plus part des cas, la participation de l'Etat ne fait que maintenir en vie une entreprise qui n'est plus viable, plus rentable.
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