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Investigation Financière Economique et Boursière
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24 novembre 2009

II Décryptage du grand emprunt (suite). Les actions 2 à 9. Les problématiques soulevées. Faiblesse du retour économique escompté

Le rapport de 128 pages sur le grand emprunt par Alain Juppé et Michel Rocard a été publié. Rapport disponible sur le site suivant http://www.minefe.gouv.fr/actus/grand-emprunt.html

Il fournit des précisions sur l'utilisation prévue des 35 milliards d'euros de grand emprunt, qui sont classés en 7 axes puis déclinés en 17 actions.

Dans une première partie http://investigationfin.canalblog.com/archives/2009/11/20/15870223.html avait été commentée l'action la plus importante en dotation, l'action 1 (10 milliards d'euros) de l'axe 1 (16 milliards d'euros).

Dans cette deuxième partie, le décryptage des actions 2 à 9.

Les problématiques soulevées :

- doublon (action 2 et 3 par rapport à 1) ou lot de consolation ? ;

- gouvernance (action 2) ;

- échéancier (action 3, action 4, action 5, action 6, action 8) ;

- répartition des dépenses dans les sous-actions (action 4) ;

- frais d'investissement ou frais de fonctionnement futurs (toutes actions) ;

- absence de référence à l'échelle européenne pour des projets à ambition mondiale (sauf action 4, 5).

La répartition cumulée pour les actions 1 à 9 (21,5 milliards d'euros des dépenses prévues) des dépenses entre retour attendu socio-économique (estimation 16 milliards d'euros des dépenses) ou économique et financier (estimation 5,5 milliards d'euros des dépenses et encore cela suppose notamment le pari réussi de succès technologiques aléatoires) montre que la notion de la mesure chiffrée de la rentabilité du grand emprunt est un voeu pieu.

Détail des 16 milliards d'euros estimés de retour attendu de type socio-économique : action 1 (10) + action 2 (2) + action 3 (2,5) + action 4 (0,5) + action 5 (0,25) + action 8 (0,7)

Détail des 5,5 milliards d'euros estimés de retour attendu de type économique ou financier : action 3 (1 ; 30 %), action 5 (0,25 ; 50 %), action 6 (1,5), action 7 (1), action 8 (0,3 ; 30 %), action 9 (1,5).

Et emprunter sur les marchés (et encore à quelle échéance, 5 ans, 10 ans ? difficile de l'appréhender) coûte entre 3 et 4 % actuellement environ.

Le grand emprunt va alourdir purement et simplement la dette de l'Etat. La comptabilisation en immobilisations ou en créances d'une partie des dépenses permettra sans doute néanmoins une moindre dégradation du bilan de l'Etat.

A confirmer avec le décryptage des actions 10 à 17 dans l'article suivant.

1) Axe 1 Soutenir l'enseignement supérieur, la recherche et l'innovation 16 milliards d'euros

Action 2 Financer, sur appels à projets, des équipements de recherche, des projets pédagogiques innovants dans l'enseignement supérieur. Financer des bourses visant à attirer ou faire revenir en France des chercheurs de renommée internationale ou post-doctorants 2 milliards d'euros

Structure de portage : Agence Nationale de la Recherche http://www.agence-nationale-recherche.fr/ créée en 2005/

La première remarque qui vient à l'esprit est de se poser la question si cette action ne fait pas doublon avec la première. D'après le rapport Juppé Rocard, les établissements bénéficiaires de l'action 1 ne pourraient pas se porter candidats aux procédures de l'action 2.

On peut interpréter ce qui précède comme une sorte de lot de consolation pour les établissements recalés de la première action.

Les deux sous-actions du descriptif se verraient attribuer chacun au sein d'un fonds 1 milliard d'euros.

Selon le site de l'ANR, sa capacité d'engagement s'élevait en 2008 à 955 millions d'euros. Le grand emprunt va accroître sa capacité d'engagement de 6,5 milliards d'euros (total des actions 2, 3 et 8) brutalement.

Selon le rapport annuel de l'ANR, 50 appels à projet ont été lancés en 2008 représentant près de 645 millions d'euros, dont 158 pour les universités, 155 pour le CNRS, 53 pour les autres établissements d'enseignement supérieur, 128 à destination du secteur privé.

D'après le rapport sur le grand emprunt, les moyens actuels de l'ANR ne permettent pas de répondre favorablement aux nombreuses candidatures. De fait, selon le rapport annuel 2008 de l'ANR, 5 856 dossiers ont été examinés et 1 334 retenus, soit 23 %.

Comme pour l'action 1, la rapport Juccard met en avant une plus grande souplesse : une plus grande réactivité qui passerait par une autonomie accrue accordée aux institutions bénéficiaires.

Les procédures actuelles de l'ANR seraient-elles donc simplifiées, libérées de carcans ? Est-bien le gage de l'efficacité de la dépense à venir, qui dépendrait en partie de l'équilibre entre le contrôle et l'autonomie ?

Une évaluation annuelle serait tout de même effectuée, mais à posteriori.

Le rapport Juppé Rocard prétend que le fonds de 1 milliard d'euros finançant des bourses d'attractivité ferait doubler les moyens consacrés à cet objectif.

Pourtant, dans le rapport annuel 2008 de l'ANR, ce montant est bien plus que 2 fois supérieur aux données chiffrées de 2008 liées à cet objectif.

Démonstration.

Dans le rapport annuel de l'ANR, le mot clé attractivité renvoie au Département Non-thématique, qui a vocation à lancer des programmes favorisant la production de connaissances et le progrès scientifique dans toutes les disciplines.

Ainsi, parmi les 3 appels à projets lancés en 2008, le programme Chaires d'excellence a pour objectif de renforcer l'attractivité du territoire national pour des scientifiques de haut niveau, en offrant un financement sur 3 à 4 ans ciblé sur un projet de recherche. Le montant total attribué en 2008 était de 11,5 millions d'euros.

Le rapport sur le grand emprunt indique également que les sommes pour cette sous-action seraient libres d'emploi pour une durée maximale de 4 ans.

Pour le programme Jeunes chercheuses et Jeunes chercheurs (sujet original, pas de thématique imposée), environ 30 millions d'euros. Pour le programme Blanc (promouvoir la place des équipes françaises dans la compétition internationale), 124 millions d'euros.

Le total 2008 d'environ 165 millions d'euros est bien inférieur aux 1 000 millions d'euros du grand emprunt, dans une échelle de 1 à 7 environ. A moins que ce ne soit sur 5 ans, auquel cas le doublement est cohérent.

Le programme Carnot est cité une première fois dans le rapport sur le grand emprunt dans le cadre de l'action 2. Selon l'ANR, il a pour objectif de rapprocher les acteurs de la recherche publique du monde socio-économique et faciliter le passage de la recherche à l'innovation. Une enveloppe budgétaire de 60 millions d'euros lui a été allouée en 2008. Cela ne modifie pas la problématique de chiffrage soulevée dans cet article.

L'aspect abondement par le privé ne semble pas concerner cette action, dont les retombées seraient, comme l'action 1, d'ordre socio-économiques.

L'absence de volonté d'aboutir à un retour sur investissement chiffrable (même si les projets financés prêtent peu à cet effort) n'est pas un argument en faveur de la rentabilité de cette action au sein du grand emprunt.

Action 3 Développer 4 à 6 campus d'innovation technologique. Professionnaliser la protection et la valorisation des résultats de la recherche publique. Soutenir les Instituts Carnot dans leur démarche de recherche partenariale dans un cadre européen. 3,5 milliards d'euros

Structure de portage : Agence Nationale de la Recherche http://www.agence-nationale-recherche.fr/

Là encore, intuitivement, on se demande si la première sous-action (pour 2 milliards d'euros, campus d'innovation) de cette action ne fait pas doublon avec la première (campus). L'accent est mis sur l'innovation. La part de financement de l'Etat serait inférieure à 50 % pour chaque projet. Les autres financements proviendraient du privé, de l'Union Européenne, et des collectivités locales (ce qui alourdirait le déficit de la France au sens de Maastricht).

La deuxième sous-action (1 milliard d'euros dans un fonds national de valorisation des projets innovants) revient à apporter des moyens importants aux sociétés de valorisation existantes (aussi citées en structures de valorisation existant au niveau des universités) ou en cours de création en France. Les objectifs me semblent pertinents : protéger et valoriser les résultats de la recherche publique (brevets), accélérer les transferts de technologie entre la recherche fondamentale et les entreprises.

La troisième sous-action (500 millions d'euros dans un fonds doté au sein de l'ANR) vise à soutenir les Instituts Carnot. Rappel, en 2008 l'ANR les finançait à hauteur de 60 millions d'euros. On change de dimension.

Le retour attendu est d'ordre socio-économique mais indirectement également financier dans les 3 cas.

Contrairement aux deux premières actions, la durée de mise en place de telles actions manque de repères. Combien d'années seront-elles nécessaires et suffisantes pour développer 4 à 6 campus d'innovation de type Leti (qui ne s'est pas fait en 2 ans !). Pour quelle durée le fonds national de valorisation des projets innovants est-il doté, autrement dit quelle est la consommation annuelle de dotation prévue ? 5, 10, 20 ans ? Aucune idée. Seules les participations dans des structures de valorisation et jeunes pousses se voient créditées d'une durée, qui consiste à ce que les structures en question atteignent l'équilibre financier après une dizaine d'années.

Sauf qu'emprunter coûte des intérêts, l'équilibre financier suggéré tient-il compte de tels intérêts ?

Action 4 Accélérer la création d'internats d'excellence pour le lycée et les filières sélectives du supérieur. Contrer la désaffection des jeunes pour les études scientifiques et mathématiques et rapprocher la science du citoyen. 500 millions d'euros.

La première sous-action (250 millions d'euros) se réfère à un dispositif existant, le dispositif « Internats d’excellence », lancé dans le cadre du plan Espoir Banlieues, qui a fourni 1 653 places dans 259 établissements en 2008-2009.

La plaquette Ensemble la Ville d'octobre 2009 évoque 2 900 places dans 444 établissements, l'objectif étant d'en labelliser 1 000 (établissements ?) de plus.

L'offre d'internats (220 000 places) est jugée insuffisante. L'objectif est de créer 5 000 places dans une dizaine d'internats d'excellence dits de projet, 15 000 places d'internat pour des élèves de classes préparatoires aux grandes écoles (ce n'est pas pour autant que le nombre de grandes écoles ou d'admis va-t-il augmenter ?), 5 000 places d'internats de ville sous-équipées.

La répartition des dépenses entre les 3 objectifs n'est pas connue.

Structure de portage : ANRU Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (200 millions d'euros) http://www.anru.fr, ACSE (Agence Nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, 50 pour la mise à disposition d'animateurs).

Précisons que le plan de relance de février 2009 a permis à l'ANRU (source ANRU) de se voir octroyée par l'Etat 350 millions d'euros s'ajoutant aux 12 milliards d'euros. En septembre 2009 116 millions d'euros ont été payés au titre du plan de relance. Mais cela concerne d'autres projets.

Un premier « Internat d’excellence » dédié avait été inauguré pour la rentrée 2009 à Sourdun en Seine et Marne. Un article du Figaro http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2009/08/31/01016-20090831ARTFIG00462-ouverture-du-premier-internat-d-excellence-.php évoque 1,5 millions d'euros de tranche d'argent public pour 128 élèves. Enveloppe (faut-il la comprendre comme des frais de fonctionnement ?) qui augmentera en pleine capacité, 500 élèves.

Se qui pose la question de la répartition dans le grand emprunt des dépenses pour créer les places et celles pour les faire fonctionner. Bien entendu cette question ne semble pas intéresser le rapport Juppé Rocard. De futures contributions permanentes au déficit de l'Etat.

La deuxième sous-action (250 millions d'euros) propose 3 sous-sous-actions pour développer le goût et l'intérêt pour les sciences, dont 150 pour un futur musée du 21 ème siècle et 75 pour une vingtaine de centres de culture scientifique destinés à un public familial.

Leurs recettes propres et mécénat couvriraient par la suite leurs besoins de fonctionnement. On peut toujours y croire. Et vérifier si les musées existants le sont ou pas.

Enfin, 25 millions d'euros pour créer un ensemble d'outil d'autoformation et de ressources pédagogiques disponibles sur internet.

La rentabilité des sous-actions est d'ordre socio-économique. Là encore la période d'implémentation prévue des sommes à dépenser n'est pas fournie.

Structure de portage des deux sous-sous-actions : futur Musée M21.

2) Axe 2 Favoriser le développement des PME innovantes 2 milliards d'euros

Action 5 Mettre en place un ou plusieurs fonds d’amorçage pour accompagner la création de PME innovantes dans des secteurs prioritaires. Instituer un ou plusieurs fonds pour l’innovation sociale. 500 millions d'euros

Des fonds transversaux seraient créés, la part publique se monterait à 450 millions d'euros. Les secteurs prioritaires : santé, alimentation, biotechnologies, information, communication, nanotechnologies, urgence environnementale, écotechnologies.

Un ou plusieurs fonds pour l'innovation sociale (favoriser l'entrepreneuriat social) sont proposés, pour un total de 50 millions d'euros.

Le Ministère de l'Economie organiserait les appels à candidature pour la gestion des fonds à des opérateurs publics ou privés.

Le retour attendu serait à la fois financier et socio-économique.

Encore une fois, absence d'échéancier.

Action 6 Permettre aux PME et entreprises de taille intermédiaire (jusqu’à 5 000 salariés) innovantes de trouver les sources de financement nécessaires à leur développement. 1,5 milliards d'euros.

Structure de portage : Oséo.

Oséo manquerait de moyens pour faire monter en puissance ses activités de financement dans l'innovation.

Les 1,5 milliards d'euros se décomposent en un apport de fonds propres de 500 millions d'euros et un prêt complémentaire de 1 milliards d'euros.

La part d'Oséo dans le financement bancaire total ne devrait jamais dépasser 50 %.

Le retour attendu est financier. Absence d'échéancier de dépense sur la durée.

Dans le plan de relance de février 2009, le coût budgétaire prévu pour garantir 4 milliards d'euros de prêt supplémentaire était de 575 millions d'euros.

La gouvernance est la même que celle mise en place dans le cadre du plan de relance. L'objectif de l'action dans le cadre du grand emprunt est très comparable. Difficile dans ces conditions de faire passer le grand emprunt en dehors des déficits publics traditionnels.

3) Axe 3 Accélérer le développement des sciences du vivant. 2 milliards d'euros

Action 7 Développer des projets et équipements scientifiques, ainsi que des plateformes technologiques de démonstration ouvertes dans les secteurs agricole et agroalimentaire. 1 milliard d'euros

Structure de portage : Ademe.

La dotation est consommable sur 10 ans, ce qui fait 100 millions d'euros par an. La participation du secteur privée est envisagée.

Les secteurs d'activité visés : biotechnologies vertes, biotechnologies blanches, bioinformatique.

Le retour attendu serait financier et socio-économique.

La grande faiblesse dans l'exposé de ce type d'action (et pour des objectifs ambitieux la remarque s'applique également à d'autres actions), c'est l'absence de référence à l'échelle européenne. La France fait son grand emprunt pour ses projets à elle.

Où est l'Europe ? S'agissant de projets d'ambition mondiale, une union européenne sur de tels sujets n'est-elle pas indispensable ? La France se la joue solo.

Un rapide passage sur le site de l'Ademe http://www2.ademe.fr permet d'apprendre que c'est plutôt au niveau européen que cela se passe :

- ERA NET IB : les applications industrielles des biotechnologies ; 2006 - 2011 ; l’ERA NET IB vise à harmoniser à l’échelle européenne les programmes nationaux et régionaux de recherche en matière de biotechnologies industrielles ;

- ERA NET BIOENERGY ; 2004-2010 ; ERA-NET Bioenergy est un programme européen dédié au développement d’une coopération structurée d’actions de recherche dans le domaine des bioénergies. Il rassemble aujourd’hui des agences gouvernementales et ministères en charge de la coopération et du financement de la recherche de 10 pays européens.

Action 8 Soutenir la recherche biomédicale d’excellence, en donnant les moyens aux meilleures équipes de continuer à rivaliser au niveau international. 1 milliard d'euros.

Structure de portage : ANR Agence Nationale de la Recherche

Deux sous-actions de 500 millions d'euros chacune sont proposées :

- créer un nombre limité (5 au maximum) de centres biomédicaux d'excellence ; dans un fonds dédié ; pas de durée indiquée ;

- mettre en place un fonds dédié à la pérennité du financement de cohortes en alimentation et santé ; il s'agit d'observer l'évolution d'une population de volontaires pour mieux appréhender les interactions entre mode de vie, soins médicaux et état de santé ; durée de 10 jusqu'à 20 ans. Cela fait rêver ?

Le retour attendu est socio-économique et financier éventuellement, dans le cas de redevances sur le recours aux cohortes.

4) Axe 4 Développer les énergies décarbonées et l'efficacité dans la gestion des ressources

Action 9 Expérimenter de nouvelles technologies dans les énergies décarbonées et l’économie du recyclage en développant des démonstrateurs et des plateformes coopératives expérimentales. 1,5 milliard d'euros.

Une première sous-action : 1,25 milliards d'euros sur 10 ans pour développer, avec le secteur privé, des démonstrateurs dans les technologies décarbonées.

Structure de portage : Agence pour les énergies renouvelables.

Une deuxième sous-action de 250 millions d'euros sur 10 ans pour cofinancer, avec le secteur privé, des projets dans le recyclage.

Structure de portage : Ademe.

Les retours attendus sont d'ordre financier et socio-économiques. Oséo est associé au processus, dans le comité de pilotage.

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Commentaires
T
After read blog topic's related post now I feel my research is almost completed. happy to see that.Thanks to share this brilliant matter.
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